Talmont-sur-Gironde (Charente-Maritime) défie la Gironde : la presqu'île de Talmont, dont la bastide fut édifiée en 1284, apparaît au dessus des flots, couronnée de son église. Edifié sur un petit promontoire rocheux qui s'avance en surplomb sur la rive nord de la Gironde, le minuscule village de Talmont dégage une rafraîchissante impression de sérénité avec ses étroites ruelles fleuries de roses trémières et bordées de jolies petites maisons blanches rehaussées de volets aux teintes pastel. Dominant le village, l'église Sainte Radegonde se dresse en pic au dessus de la Gironde. Construite au XIIème siècle, elle est parfaitement représentative du style roman saintongeais. Cette église est entourée d'un petit cimetière d'où la vue porte sur l'estuaire de la Gironde et sur les falaises voisines de Meschers-sur-Gironde. Ce village est labélisé "Les plus beaux villages de France".
Le visiteur devient évidemment piéton lorsqu'il pénètre sur la presqu'île en venant du grand parking. L'isthme est étroit, on voit l'eau de part et d'autre du chemin, déjà le dépaysement est assuré. Une grande place avec un Point Accueil, quelques arbres et on pénètre par la "Rue de la Porte de la Ville" dans ce qui fut autrefois une citadelle, une "Ville Close" du Moyen-Âge. (allez voir au musée le plan relief de la ville en 1706 afin de comprendre le quadrillage de ses rues, lequel n'a pas changé depuis huit siècles) On ne risque pas de s'y perdre car le site étant autrefois une île, on peut en faire le tour en se guidant sur le plan distribué à l'entrée.
A droite, "la Rue de l'Ancien Château" conduit au Promontoire d'où le regard s'étend vers la côte de Meschers et, de l'autre côté de la Gironde, vers la Pointe de Grave. La place est bordée par les restes des remparts édifiés sur l'ordre du roi d'Angleterre Edouard Ier en 1284. En les suivant, on se dirige vers l’église Sainte Radegonde dont on aperçoit la masse trapue au-dessus des maisons. Le piéton marche lentement, il a le temps d'apprécier les senteurs marines si particulières à cette presqu'île ressemblant à un navire, avec la célèbre église romane en figure de proue, construite au XIIème siècle par les moines de l'abbaye de Saint Jean d'Angély. La façade Ouest de l'édifice fut reconstruite en style gothique au XVème siècle après qu'une travée de la nef soit tombée à la mer. Depuis lors, les travaux de protection contre les colères des eaux se sont répétés avec une régularité nécessaire. La devise de la ville n'est-elle pas "Talmont au péril des flots" ? Le furieux raz-de-marée du 29 décembre 1999 avait creusé une caverne sous le chevet de l'église. C'était le seul endroit qui n'ait jamais été défendu par la falaise ou un rempart. Il fallut entreprendre des travaux d'urgence et terminer ainsi en 2000 la muraille commencée 700 ans auparavant par les Anglais. A l'entrée du cimetière un panneau donne des indications succinctes sur l'église.
Près de l’église, le musée propose les compléments indispensables pour comprendre le curieux vocabulaire du portail de style roman Saintongeais, ou bien l'histoire de la frégate ex-voto classée Monument Historique suspendue à la voûte. Une librairie régionaliste vous permet de consulter et d'acheter des livres sur l'histoire locale.
Derrière l'église, la "Promenade des Remparts", bordée par les restes d'un chemin de ronde, offre des points de vue uniques sur l'estuaire et les côtes du Médoc. En cet endroit, la Gironde atteint sa plus grande largeur, 12 km, Bordeaux est à 80 km par la rivière.
En suivant la falaise, le visiteur arrive aux vestiges les plus visibles et les mieux conservés de la citadelle, ceux de la "Tour Blanche", ainsi nommée par les Anglais en souvenir de la "White Tower", la célèbre Tour de Londres. Sa porte ouvre sur l'estuaire, et l'on peut ainsi mesurer le recul de la falaise sans savoir toutefois à quelle époque la tour s'est écroulée dans les flots. On sait par contre que les espagnols, forts dépités d'être chassés de la ville en 1652, ont largement contribué à sa ruine avant de partir.
Depuis la Tour Blanche, on profite d'une vue imprenable sur la Roche du Caillaud, ses vignobles et ses carrelets (cabanes de pêche). C'est là où les Américains, en 1917, avaient commencé de construire un immense port en eau profonde afin de recevoir hommes et matériel pour la guerre (plans à voir au musée). Les falaises furent dynamitées et reculèrent de 30 m. L'armistice de 1918 mit fin à l'entreprise. Mais les galeries et les puits de mines ayant été laissés en place, l'énorme vague de 1999 s'est engouffrée dans les ouvertures, fit exploser la falaise et avec elle les 25 carrelets retrouvés entassés au fond de la baie, aux portes des maisons du Caillaud. Aujourd'hui, la plupart d'entre eux ont été reconstruits, courageusement...
Après la Tour Blanche, le sentier débouche sur le port. Avec des quais inclinés construits en 1835, il a conservé l'aspect ancien des petits ports de l'estuaire. Les pontons de bois accueillent, de mai à juillet, les canots des pêcheurs de maigres, un poisson étonnant que l'on pêche "à l'oreille" en se guidant sur les grognements qu'il émet au moment de la reproduction. Certains des canots sont des yoles, embarcations traditionnelles pointues à chaque extrémité munies d'un tau, une toile triangulaire de couleur protégeant des embruns. Dans la cour du Musée de la Pêche, près de l'église, est ancrée pour toujours l'une des dernières yoles en bois construites sur l'estuaire.
Avec la visite du port, le visiteur achève son tour de l'île du début des âges. Il lui reste à s'égarer un peu dans le damier des rues et des ruelles de la Ville Close. Des artisans et artistes, peintres, potiers, stylistes, des magasins de cartes postales et de souvenirs, des cafés et des restaurants attendent les chalands, apportant en toute saison une vie paisiblement animée à ces lieux qui ont traversé les siècles en domptant les périls. Sur la "Place de la Priauté", un tilleul flamboyant, planté en 1895, protège la Mairie.
Enfin, à deux pas de là, sur le chemin du retour vers le parking, le visiteur peut monter sur la Roche du Caillaud, afin de bénéficier d'un panorama exceptionnel sur la presqu'île, l'église et l'embouchure de l'estuaire. En prime, les vignes y produisent d'excellents vins, foi de Bernard Pivot et de son "Dictionnaire amoureux du vin".
Et pour terminer la visite, il ne faut pas oublier qu’il est surtout conseillé de visiter Talmont-sur-Gironde courant juin-juillet car c’est le village des roses trémières que l’on rencontre, en tout lieu, dans chaque ruelle, à profusion et de toutes les couleurs !
Mais en avril-mai, Talmont-sur-Gironde n’en reste pas moins un village fleuri car, à chacun de ses coin ou recoins, ce sont les valérianes qui précèdent de leur lumineuse floraison celle des roses trémières.
L'église Sainte-Radegonde est l’église paroissiale catholique du village de Talmont-sur-Gironde. Édifiée sur une falaise surplombant l'estuaire de la Gironde, cette église est parfois considérée comme l'archétype du style roman saintongeais.
L'église Sainte Radegonde est édifiée à partir du XIème siècle à l'initiative des Bénédictins de l'abbaye de Saint Jean d'Angély, lesquels auraient fait du sanctuaire une étape sur l'un des chemins de Saint Jacques de Compostelle. Ainsi, après avoir suivi la Via Turonensis jusqu'à Saintes, certains Jacquets auraient-ils choisi de se rendre à Talmont d'où ils auraient embarqué pour la basilique de Soulac, sur l'autre rive de l'estuaire de la Gironde, poursuivant leur périple par la Voie de Soulac.
La transformation du village en bastide par le roi d'Angleterre Édouard Ier, Duc d'Aquitaine, implique la fortification d'une partie de l'église. Un chemin de ronde est édifié au-dessus de l'abside. Cependant, ce ne sont pas les guerres qui provoquent la destruction d'une partie de l'église, mais une violente tempête qui cause l'effondrement d'une partie de la falaise servant d'assise à l'édifice. Les deux premières travées de la nef et une partie de la crypte sont emportés par les flots. Des travaux de consolidation sont effectués par la suite, tandis qu'une nouvelle façade gothique est édifiée.
L'église est classée monument historique le 30 août 1890.
Les premiers travaux de restauration importants interviennent dès 1929, année qui voit le dégagement d'une partie de la crypte-ossuaire. En 1935, la coupole et la base du clocher sont remis en état à leur tour. Cependant, dans les années de l'immédiat après-guerre, l'érosion de la falaise semble condamner l'église à un effondrement inéluctable.
S'opposant à la sobriété de la façade occidentale, refaite dans un style gothique assez sec après l'effondrement d'une partie de l'édifice au cours d'une violente tempête, ou à la face latérale Sud, exposée aux intempéries, la façade latérale nord est typique de l'art roman saintongeais. Cette dernière est formée de trois registres verticaux. Dans sa partie inférieure s'ouvre un portail à trois voussures flanqué de deux arcades, tandis que la partie intermédiaire comporte une série de sept arcades supportées par des colonnettes et que la partie supérieure, formant pignon, est ornée d'un oculus.
Les sculptures du portail sont caractéristiques de la pensée médiévale selon laquelle la pierre doit être "la bible des illettrés": elles sont ainsi des sermons imagés.
Sur la voussure supérieure, des hommes tirent avec une corde un animal prisonnier, tandis que la voussure centrale montre des hommes portés les uns par les autres, "échelle humaine", possible métaphore de la communauté chrétienne unie et solidaire. Enfin, la voussure inférieure montre des anges honorant l'agneau pascal, symbole du christ.
Les voussures ornant les deux arcades latérales représentent l'enfer et le paradis. Celle de gauche est ornée de dragons ailés amphicéphales, gueule béante et crocs acérés. A l'opposé, celle de droite montre des pampres de vigne symbolisant la vie nouvelle.
À l'est, l'abside est divisée en cinq registres horizontaux par des contreforts-colonnes. Une partie du décor a été refait lors de la restauration entamée dans les années 1960, notamment les modillons. Sur une colonnette de l'abside, un cadran solaire gravé porte la date de 1586.
L'intérieur du sanctuaire contraste par sa sobriété. Présentant à l'origine un plan en croix latine, l'édifice est aujourd'hui limité à une nef d'une seule travée, un transept prolongé de deux absidioles, un avant-chœur de 8 m de long et une abside de 4,80 m de long, voûtée en cul de four. À la croisée du transept s'élève une coupole sur pendentifs.
De part et d'autre de la nef se trouvent deux escaliers conduisant à une crypte établie sur deux niveaux : au niveau inférieur était aménagé l'ossuaire, lui-même surmonté d'une chapelle funéraire.
Parmi le mobilier de l'église se trouve un christ en bois (restauré en 1995 après avoir été victime de vandalisme) et un antependium du XVIIème siècle. Une frégate ex-voto du XIXème siècle orne l'absidiole du croisillon Nord.
Le cimetière marin borde l'église sur son flanc septentrional. Héritier de l'ancien "Clouzit" médiéval (cimetière clos entourant traditionnellement les églises saintongeaises), il conserve des tombes datant du XVIIème siècle.
Jusqu'au début des années cinquante, le cimetière était divisé en deux enclos distincts : l'un pour les catholiques, l'autre pour les protestants. Faisant la jonction entre les deux parcelles, une ancienne rue baptisée "Rue des Canons" débouchait sur le parvis de l'église.
Le cimetière abrite toujours de nombreux cénotaphes, témoignages d'un renouveau de l'art funéraire dans le courant du XVIIème siècle. L'un d'entre eux a été déplacé dans la cour du musée en 1996. L'épitaphe latine qui y est gravée célèbre la mémoire de l'épouse d'un capitaine de navire décédée en 1845.
Comme l'ensemble du village, le cimetière marin se pare de nombreuses roses trémières durant la saison estivale.
Il est classé monument historique depuis le 21 février 1934.
La Promenade des Remparts donne un magnifique panorama sur La Gironde
La Tour Blanche offre une vue imprenable sur La Gironde, les falaises du Caillaud et les carrelets à ponton.
Le port de Talmont, fort modeste, a gardé sa configuration du XIXème siècle. Point de grues ou de cuves à mazout, mais un simple chenal d'environ 200 m, où stationne une flotille d'une vingtaine de bateaux de pêche (yoles, filadières...).
On appareilla jusqu'en 1982 pour la pêche à l'esturgeon (appelé creac en saintongeais et en occitan), qui fournissait un caviar très prisé des amateurs, comparé même à ceux produits en Iran ou en Union soviétique. La surpêche a cependant eu raison de cette activité, et la pêche à l'esturgeon est aujourd'hui interdite. On produit toujours du caviar dans la région, mais issu de fermes aquacoles (caviar de Gironde ou caviar d'Aquitaine).
De nos jours, on pêche surtout le maigre, la lamproie ou la pibale (alevin d'anguille au goût très fin). Ce mets se faisant de plus en plus rare, il est généralement très cher.
Les carrelets à ponton tels qu’on les connaît aujourd’hui en Gironde et en Dordogne sont apparus au XVIIIème siècle pour répondre aux besoins fonctionnels des pêcheurs. Construits dans des cadres paradisiaques, les carrelets ont attiré et attirent toujours un public diversifié qui s’est démocratisé au cours de l’histoire. En un siècle, les carrelets ont affirmé leur appartenance au patrimoine de la région Aquitaine. Ils sont quelques centaines sur les rivages de l'Estuaire de la Gironde et de la Dordogne. Etymologie de carrelets : le mot se découvre dans la langue française vers 1360 (avec l’orthographe "quarlet". Au cours de l’histoire, les relations entre les hommes et les carrelets ont évolué. Contrairement aux idées reçues, la pêche au carrelet ne permettait pas aux hommes de survivre. La pêche « des pauvres, des sans-travail, des sans ressources » donnait tout juste un complément alimentaire fort apprécié ; parfois lorsque les prises étaient conséquentes, celles-ci représentaient une monnaie d’échange. La pêche au carrelet est avant tout une pêche de hasard, puisque le filet ne retient que le poisson qui s’y trouve au-dessus, au moment de la remontée du filet.
Vers 1900, apparaissent les premiers carrelets à ponton. Cette méthode de pêche traditionnelle est très ancienne et remonterait au XVIIIème siècle. Dans un souci d’amélioration des conditions de pêche, les pêcheurs mettent en place des installations sur pilotis et un mécanisme pour le filet. Les carrelets à poste fixe ou carrelets à ponton apparaissent vers 1900 sur les quais, les digues des ports, les avancées de rochers surplombant la mer, ainsi que dans les "trous" des falaises qui offrent à la fois des plates-formes pour les mâts et des abris pour les pêcheurs. Très vite poussés par l’envie de trouver un emplacement idéal, les pêcheurs édifient des installations en hauteur plus complexes avec une passerelle et une plate-forme pour poser le mécanisme du filet. Le carrelet a pour origine une sorte de tamis manipulé avec les mains, c’est-à-dire une structure de grande taille construite avec des matériaux rudimentaires à laquelle est accroché un filet de pêche, à nappe carrée à maille simple. Les premiers carrelets étaient posés près du bord de l’eau avec une perche plantée dans le sol et au bout de laquelle était suspendu le filet : les pêcheurs pratiquaient la pêche à pied.
Le Caillaud est une falaise précédée par une plate-forme rocheuse. La roche s'effondre par endroit, là où la résistance a été amoindrie par le percement des galeries de mines, en 1918, par l'armée américaine.
Les Roses Rrémières ou Les "Demoiselle sans-gêne", emblématiques de Talmont, se laissent admirer et sont indissociables de Talmont jusqu’à devenir un cliché. En effet, la rose trémière est le mythe de ce minuscule bourg de carte postale dont l’église Sainte Radegonde regarde passer l’estuaire du haut de son caillou. Qui a jeté la première graine de cette plante bizarre et capricieuse, qui pousse là où on l’attend le moins, se moque de la pluie et du beau temps, et même des petits soins des jardiniers, que l’on croit planter jaune et qui pousse rouge, et fleurit quand elle en a envie ?
Car, soyez-en sûr, si la rose trémière date de bien avant la plus haute antiquité, elle n’est pas venue toute seule à Talmont (ni dans tout le reste de la France de l’Ouest non plus d’ailleurs). Elle aime la lumière douce, l’air marin, et se contente de quelques cailloux pour puiser son charme. Trémière signifie "d’outre mer", assure certains jardiniers locaux. En effet, il est probable que des graines ont été ramenées, sans doute au Moyen Age ou plus tard, dans la poche d’un marin ou d’un soldat…, se plait à imaginer tout poète jardinier qui connaît la flore de sa région. L’Outre-Mer est vaste. Il l’était encore plus il y a 600 ou 700 ans. Il semblerait, en effet, que cette plante vienne de Sibérie méridionale. Toujours est-il qu’elle s’est parfaitement intégrée sous nos latitudes, au point d’envahir le territoire quand elle s’y sent bien, comme une mauvaise herbe.
A Talmont, les roses trémières sont chez elles, partagent la vie des Talmonais et ravissent les visiteurs. Elles s’en vont à la messe à Sainte Radegonde en procession, dodelinant de la tête en traversant le cimetière. Elles jouent entre les tombes, capeline rose, rouge ou jaune au vent, descendant à la Gironde en rasant les murs, se penchent imprudemment au-dessus des falaises, jettent des regards indiscrets aux fenêtres des maisons aux volets bleus en se massant sur les trottoirs comme des gamines espiègles.
Le soleil de la fin août les contrarie et, de mauvaise humeur, elles laissent leur feuilles se faire grignoter par la rouille. Les jolies demoiselles en fleurs se muent en vieilles filles acariâtres et flétries. Le jardinier sérieux les coupe sans pitié et ramasse les graines, toujours après le 15 août. Bonnes filles, elles reviennent l’année suivante : graciles, mutines, sans-gêne !
Cette mouette vous dit : "Au revoir... et à bientôt !"
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